dimanche 29 juillet 2012

L'Art de la guerre.

La découverte de la casbah de Taferdouste peut se décliner aisément sur  plusieurs thèmes de visites.
Un qui me tient particulièrement à coeur est issu de la Poliorcétique (du grec polis=la ville et rketikos=la clôture); elle concerne l'art de la guerre, la science et la technique de la défense ainsi que de l'attaque.

Taferdouste est avant tout une forteresse, née d'une préoccupation majeure: protéger un groupe de gens et leurs biens.

Se protéger de qui? de tribus ennemies convoitant de nouveaux territoires (ceci fera l'objet d'un autre article), mais aussi de la  prédation et de la nuisance de certains animaux depuis les fauves, les 
charognards, jusqu'aux souris. En effet s'il a fallu protéger les biens matériels il en a surtout été de même pour les animaux de bât et les denrées alimentaires.
 L'espace intra-muros a donc été aménagé en cellules consacrées à la vie quotidienne, à la stabulation des animaux, et enfin au stockage des récoltes.
 L'homme pouvait compter sur des  auxiliaires, tels que les chiens, les chats, les poules et autres dindes qui naturellement jugulaient l'espérance de vie d'un tas de vermines indésirables; serpents, petits rongeurs et autres scorpions.
Taferdouste cumule donc les fonctions principales d'habitat, de grenier et de fortification.
En outre, la cité était aussi un symbole du prestige et de la puissance de la confédération des tribus locales et un véritable verrou stratégique dans la vallée.
La préoccupation majeure des bâtisseurs fut de trouver un endroit idéal  pour s'établir.

Géographiquement, l'éperon rocheux situé dans un méandre de la rivière (oued Guigou), était un endroit parfait, accessible uniquement par une sente étroite, facile à défendre et constituant un mirador naturel avec une vue à 360°, empêchant ainsi tout ennemi  d'approcher, sans être vu de loin. Le relief accidenté sur le pourtour du site, constituant déjà, un obstacle infranchissable.
La rivière circonvoisine, une cascade intarissable et probablement un  puits ou une citerne devaient assurer l'approvisionnement en eau, vitale pour un établissement de longue durée.

Le génie des bâtisseurs;
Les constructions étaient inhérentes aux ressources locales en matériaux disponibles; essentiellement la pierre trouvée sur le massif même, les poutres en bois issues des cédraies de la région, l'eau, la terre, la 
paille nécessaire pour effectuer la toiture des bâtiments ainsi que la couverture murale assurant l'isolation thermique été comme hiver.
L'habitat était performant en terme de qualité de vie, 100/100 naturel et écologique avant la lettre.
La cité était accessible par trois portes, mais il n'est pas impossible que celles-ci correspondent à des phases chronologiques différentes.
Il semble certain toutefois que la plus ancienne entrée se faisait au nord, à l'endroit où il était aisé de défendre l'accès à l'éperon barré.


Le passage ne permettait guère à plus de deux ou trois personnes d'arriver de front à l'entrée de la cité. Celle-ci était défendue par une tour-porte, fortifiée par des murs épais.
Elle comportait un étage  dans lequel un guetteur montait la garde et contrôlait les allées et 
venues. Le soir, lorsque toute la communauté était rentrée, il fermait  les portes jusqu'au lendemain.
Etat actuel de l'entrée principale, qui comportait une porte à double battant à l'origine et reconstitution grâce à l'emprunt virtuel de la porte de l'agadir de Tasguent.


Etroitesse du chemin d'origine:


Economie de moyens et économie d'effort;
Il n'y a pas de remparts avec une courtine permettant un chemin de ronde, l'originalité consistant 
dans le fait que chaque maisonnée, chaque cellule, est contigüe à sa voisine, épousant le relief circulaire de la montagne et constituant ainsi un mur ininterrompu autour de la cité.


En observant bien le rempart flanquant la tour d'entrée, on devine quelques rares ouvertures triangulaires, celles-ci auraient pu constituer des espaces de tirs ou meurtrières (cf. entrée de l'agadir d'Aguelluy), prenant par surprise un ennemi potentiel sur son flan gauche.


Pour échapper aux tirs, l'assaillant devait rebrousser chemin, gênant l'avancée de ses comparses, ou encore tenter "le sauve qui peut" en sautant à droite dans le vide!
L'entrée elle-même était une chicane qui avait pour but de freiner un éventuel déferlement vers l'intérieur, peut-être y avait-il aussi un système de "sas" constitué par une seconde porte hors de vue de l'assaillant.
Un examen détaillé des éléments  architecturaux pourrait mettre en évidence d'autres subtils 
aménagements défensifs.

De même il devait être impossible de dresser une échelle pour tenter d'escalader la muraille, il ne faut pas sous-estimer l'intelligence des bâtisseurs qui ont pu mettre en place des éléments de défenses passives,  tels des obstacles, rochés ou barbelés naturels constitués par des buissons d'épineux et autres cactus ou figuiers de barbarie.


Même un rucher à l'emplacement savamment choisi non loin de la porte, et accessible par quelques projectiles pouvait libérer une armée d'abeilles en furie créant la panique chez l'agresseur.
C'est là que l'on prend bien la dimension que la guerre est hélas un art, où la finesse ultime consiste en l'économie de moyens mis en oeuvre pour répondre somme toute à cette question: "Comment faire le plus de mal, en se fatiguant le moins possible?..."

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